De l’aliénation publicitaire (I) – Sexismes et marchandisations

A l’échelle de la planète, ce sont des centaines de milliards qui sont investis chaque année uniquement dans la publicité. Outil par excellence de l’aliénation consumériste, elle sert et concrétise la volonté de la société marchande de nous dégrader et nous humilier afin de mieux nous asservir à ses volontés totalitaires. Elle utilise nos peurs, nos fantasmes et nos angoisses pour nous manipuler, pour créer un manque et un mal-être propice à la consommation perpétuelle. C’est alors que nous achetons pour nous sentir bien, pour être « mieux », pour nous intégrer et nous accomplir, aveuglé-e-s que nous sommes par cette non-réalité sans défauts que la publicité nous impose en horizon et objectif à atteindre dans un perpétuel bond en avant vers la carotte du « soi parfait-e » – tandis que le bâton n’est plus une menace externe mais bien une auto-contrainte intériorisée par le dressage des corps et des esprits qu’elle implique.

Elle nous interdit de vieillir, d’être « autre » et d’être nous-mêmes. Elle nous fait culpabiliser face à notre non-conformité individuelle (poids, condition physique, gouts,…) et rend nos choix indésirables dès qu’ils sortent de la logique de la consommation effrénée. Elle dramatise notre existence (notre corps va mal, nos objets sont vieux, on est inadapté-e,…) pour mieux imposer ses solutions miracles faites de nouveaux produits toujours plus « modernes » qui, par obsolescence programmée et désirabilité sociale, portent eu eux les conditions de leur dépassement vers le produit suivant qu’il s’agira d’acquérir pour s’accomplir, de posséder pour « être ».

On n’en sort jamais,… ça n’est pas le but.

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Elle ne propose aucune « solution ». Elle nous fait croire à des « combats » perdus d’avance (contre la maladie, la vieillesse, la solitude, l’imperfection,…) pour nous faire consommer dans une fuite en avant sans fin, promesse d’une infinité de produits miracles à la clé, pour notre bien. Elle s’insinue en nous et nous pousse à rivaliser à coup d’achats avec ses propres modèles irréalistes et contre-nature, qu’elle impose pourtant en idéaux avec lesquels nous nous comparons constamment, avec lesquels elle nous exhorte à rivaliser en vain dans une perpétuelle négation de nous-mêmes.

Elle combat la lenteur, propice au recul et aux questionnements, et nous impose un culte de la vitesse pour nous faire perdre pieds. Elle combat l’imagination et la rêverie, activités contraires à l’imposition de ses solutions toutes faites et prêtes à l’emploi. Elle nous veut du mal en combattant ce qui peut apaiser ou relativiser car une personne bien avec elle-même n’est pas une bonne consommatrice vu qu’elle n’a rien à combler par l’achat.

Perpétuellement sexiste, elle renforce les représentations stéréotypées des sexes représentant la plupart du temps les femmes dans des positions d’infériorité. Elle est néfaste et dangereuse, en sexualisant à outrance des « modèles » véhiculant des normes physique mettant en péril notre santé mentale et physique, que ce soit par ses injonctions à nous y conformer (anorexie, chirurgie, tortures esthétiques) ou par le fait de nous faire comprendre qu’on n’y correspond pas, que l’on est hors-jeux par notre seule faute (culpabilité, névroses, boulimie,…). Elle alimente la culture du viol en présentant des corps de femmes sexualisés, disponibles, allant parfois jusqu’à des mises en scène concrètes de violences sexuelles. Elle est dans tous les cas un outil d’asservissement des femmes en particulier, par sa volonté de dépolitiser le social en les détournant d’elles-mêmes au profit de chimères empoisonnées, créées par le patriarcat et au service de ses intérêts.

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Elle n’est jamais « information passive » tant elle est omniprésente sur des multiples supports toujours plus nombreux et toujours plus intrusifs, avides de nous désinformer dans l’unique but de nous vendre un modèle de vie basé sur la consommation des autres et de soi-même en fonction de l’avoir et du paraitre, à l’aide de produits qu’elle prétend toujours plus « performants » alors qu’il ne s’agit que d’une consommation répétée de sophistications toujours plus inutiles, insensées, provoquant d’incroyables désastres humains et environnementaux.

Antidémocratique, elle ne profite qu’aux grandes entreprises déjà dominantes et seules à même de pouvoir accéder à ces canaux de manipulation et d’oppression. Antipolitique, elle a les moyens d’échapper aux contrôles démocratiques et de s’imposer aux « représentant-e-s » politiques afin d’éviter toute législation qui pourrait la contraindre. Elle arrive à ses fins partout en Europe par le principe « d’autorégulation » qui nous laisse à la merci des entreprises les plus puissantes tant nous ne sommes plus que des cibles dépolitisées prenant place dans un espace public privatisé par la défaite d’Etats refusant de voir leur propre et lamentable échec.

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La publicité est une machine à exploiter nos peurs, nos névroses et nos faiblesses. Elle modèle un individu conforme aux besoins du système totalitaire marchand. Elle a créé une nouvelle forme de misère, celle de l’individu paumé, qui ne cesse de surconsommer, que l’on maintient éternellement en manque et qui meurt chaque jour un plus insatisfait qu’hier.

Elle n’est pas anodine et personne ne peut y échapper. On a toutes et tous quelque chose à lui reprocher. La publicité ne fait pas qu’essayer sans relâche de nous fourguer tout et n’importe quoi, de nous encombrer sous un tas d’immondices qu’elle prétend nécessaires et que l’on acquiert par notre propre asservissement au salariat, où l’on se vend pour acheter. Elle s’insinue dans nos vies, nos pratiques, nos pensées et nos relations. Elle pollue nos imaginaires et nos rêves, transforme nos perceptions de nous-mêmes et d’autrui, s’introduit dans notre intimité et se greffe à nos comportements pour mieux les orienter vers une mort certaine, du cœur, du corps et du lien social.

En tant qu’indispensable outil du patriarcat et bras armé du fléau originel qu’est le système d’exploitation capitaliste, elle est la négation de la vie, elle est constituée par tout ce que nous refusons, et c’est pourquoi nous la combattons dans sa totalité et que nous inscrivons cette lutte dans la condamnation plus radicale de nos sociétés industrielles.

JS

« Ne pas s’y tromper. Nous ne contestons pas la publicité, mais la totalité de la déshumanisation industrielle organisée par la démocratie étatique »