Femmes et logement

Comme tout problème de société, le problème du logement ne touche pas que les femmes. Mais, comme c’est également le cas avec de nombreux problèmes, elles en sont particulièrement touchées quand elles se trouvent dans des situations « typiquement féminines ». 

Ce sujet n’est pas « porteur » et même frappé d’un certain tabou, aucun parti politique n’en fera son cheval de bataille. Il s’agit d’un sujet transversal, touchant des femmes de tout milieu, condition et provenance. Le tabou fait que de nombreuses personnes ne sont, de toute bonne foi, pas consciente du problème, jusqu’à ce qu’elles en soient touchées elles-mêmes. Et à ce moment-là, elles se taisent, de honte, ou, complètement dépassées par les événements, elles parent au plus pressé de tous les côtés, sont en mauvaise condition physique et psychique et n’ont pas la force de faire un travail de sensibilisation à la situation discriminatoire qui les frappe. 

Voici la situation :

 Le modèle de famille le plus répandu est toujours le couple où l’homme travaille à l’extérieur à 100 %, la femme à temps partiel ou pas du tout. En cas de séparation, c’est généralement la femme qui garde les enfants, surtout si c’est elle qui s’en est toujours occupée. Mais du fait qu’elle s’est occupée des enfants et de la maison, elle n’a guère un grand revenu. Comment trouver un logement ? Même si son mari lui paie une pension, qui dans le meilleur des cas sera assez élevée pour tourner et qui sera toujours versée ponctuellement (ce qui n’est souvent pas le cas), les gérances immobilières préfèrent une fiche de paie rondelette, les pensions alimentaires ne sont pas assez sûres.

Et même si elle peut pour commencer garder le logement du couple, le problème n’est que reporté, car ce logement sera souvent trop cher à la longue, il faudra changer.

La femme séparée ou divorcée essaiera de retrouver un emploi à plein temps, ou en tout cas à un taux supérieur. C’est très difficile, elle trouvera plutôt des « petits boulots », par-ci, par-là, au noir ou pas, elle fera des remplacements, des ménages, si elle est coiffeuse, elle se trouvera quelques clientes privées. Tout cela lui permettra de vivre et d’avoir assez d’argent pour payer son loyer, mais pour une gérance, ce n’est rien.

De plus, les familles avec enfant ou pire avec enfants au pluriel ne sont pas appréciées par les gérances, surtout pas les familles monoparentales, car ces enfants-là sont réputés particulièrement mal élevés, casseurs, laissés à eux-mêmes, etc.  Donc, ce n’est pas un atout non plus pour trouver un logement.

Pour couronner le tout, les logements sont chers pour tout le monde, un logement assez grand pour une famille à prix abordable, cela s’arrache, et ce sont « les meilleurs » qui gagnent. Pour les raisons mentionnées ci-dessus, les femmes seules avec enfants ne sont pas les meilleures.

Si la femme veut, en désespoir de cause, prendre un appartement plus cher, qu’elle se débrouillera de payer, la gérance lui dira que le loyer ne doit pas dépasser X pour cent du revenu, alors que son revenu est trop petit, donc c’est non. Qu’elle n’ait peut-être pas de grands frais de voiture, pas de dettes, etc., cela ne compte pas.

Si elle veut, toujours en désespoir de cause, prendre un appartement plus petit, par ex. un 2 pièces, même si elle a 3 ou 4 enfants, on lui dira que les appartements de deux pièces sont pour des personnes seules ou éventuellement pour un couple sans enfants, et qu’avec 3 ou 4 enfants, il lui faudra un 4 pièces (sans toutefois lui en proposer un). 

Il ne faut pas oublier non plus que ce n’est pas que la femme qui se trouve dans cette situation difficile. Quelle que soit la situation de logement que la femme trouvera, ses enfants en seront concernés. Les enfants, ce sont les futurs électrices et électeurs. C’est peut-être par là qu’on pourrait sensibiliser les milieux qui tiennent le pouvoir en mains ?

 Le cas de la femme plus âgée dont les enfants sont hors de la maison n’est toujours pas sans problèmes. La femme qui a passé sa vie à élever ses enfants en travaillant éventuellement à temps partiel par moment ne retrouvera jamais un emploi convenablement payé. Si elle veut quitter son mari, et que par malheur ce mari n’a pas un gros revenu, ne lui versera donc pas une grosse pension, ou si ce mari ne paie pas son dû, elle se trouve dans une situation très précaire, ne pourra pas justifier un bon salaire stable et ne sera de ce fait pas acceptée en tant que locataire. Elle trouvera certes des petits boulots par-ci, par-là, mais … voir plus haut.

 Pour terminer, quand elle arrivera à l’âge de la retraite, elle n’aura peut-être que l’AVS. Si certes, c’est une source de revenu stable, il est toutefois difficile de satisfaire une gérance rien qu’avec cela.

 Tout cela peut, bien sûr, aussi arriver à un homme. Il sera, dans ce cas, tout autant à plaindre. Mais dans les faits, cela arrive surtout à de nombreuses femmes et à beaucoup moins d’hommes.

Birgitta Bischoff

Cet article vous interpelle ? Vous avez envie d’agir ? Vous avez de bonnes idées ?

J’aimerais fonder un groupe de travail « Logement ». Me contacter via contact(at)feminista.ch ou par téléphone, voir sous « Contact ».