Les jeunes organisent des rixes? La faute aux femmes!

« Nous vivons dans une société surpacifiée, où le système scolaire est féminisé. Les chiffres démontrent que les femmes sont majoritaires au niveau de la maturité et des études supérieures. Les critères de sélection favorisent les filles à l’école. On peut dès lors se demander si les hommes trouvent encore leur place à l’école s’ils n’adoptent pas le modèle féminin. »

Sandro Cattacin, professeur au département de sociologie de l’Université de Genève, n’a pas peur d’asséner de grandes vérités dans Le Temps de mardi 28 septembre, alors qu’on l’interroge sur le phénomène des bagarres collectives de jeunes. Ainsi, la violence des jeunes (sous-entendu, bien sûr (!): « des jeunes hommes »), seraient due à la « féminisation » excessive de l’institution scolaire. La séparation grossière et très peu critique entre femmes et hommes, qui en tant que femmes et hommes, constituent, selon le sociologue, des catégories clairement séparées avec des cultures différentes, incommensurables et surtout nocives l’une envers l’autre, est digne du masculinisme le moins subtil.

La citation suivante démontre avec encore plus de clarté les équations ridicules « femme (la Femme!) = douceur, passivité, bêtise » et « homme= brutalité, activité, intelligence ».

« Les modèles féminisés et masculinisés sont mis en cause, mais le facteur biologique existe, c’est un fait: le corps de la femme se développe à un autre rythme que celui de l’homme. Jusqu’à l’âge de  18-20 ans, les comportements sont différents. Les garçons jouent avec les frontières du corps, sont souvent plus agressifs, ce qui est de moins en moins toléré. En ce sens, ils sont victimes d’un système scolaire féminisé: aujourd’hui, l’école est un lieu où on écoute, où on apprend par coeur, où on répète, voilà ce qui est valorisé. La maîtrise du corps, le sport, l’expérimentation et l’apprentissage de la gestion du risque y sont marginaux. »

Pour ne pas perdre trop de temps à relever les raccourcis sociologiques grossiers  et même erronés dont est truffé cet extrait, j’aimerais simplement en remarquer un: une école « où on apprend par coeur » est une école plutôt traditionnelle, connue depuis des dizaines d’années, déjà à l’époque où on avait aucun doute sur la « virilité » de l’école, où on trouvait au contraire que les filles n’y étaient pas à leur place. Des longs poèmes appris par coeur, des déclinaisons grammaticales apprises sans analyse, tout ça fait même beaucoup plus penser à la vieille école, qu’on ne pouvait soupçonner d’être « féminisée », qu’à l’école d’aujourd’hui, dans laquelle les enfants sont encouragé-e-s à comprendre plutôt qu’apprendre bêtement par coeur.

Voilà, un coup de gueule rapide, pour dénoncer une sociologie facile, basée sur des schémas biologisants. Une sociologie qu’on peut même qualifier de sexiste, puisque non seulement elle attribue des caractéristiques universelles à toutes les femmes, caractéristiques dont on peut plus que discuter la neutralité (« apprendre par coeur » me semble plutôt un mode d’apprentissage pas très futé…), mais elle accuse gratuitement les femmes, en accusant « la féminisation », d’être responsables de phénomènes de violence.

Laura

One comment

  • bonjour,

    je viens de lire votre article que je trouve intéressant. Simon- Bernard Cohen a fait études ur le syndrôme d’Asperger comme étant une forme extrême du cerveau masculin. Pour lui en effet, le cerveau masculin est plus systémiste, c’est-à-dire organisateur, tandis que le cerveau féminin est plus « emphatique », c’est-à-dire de l’ordre du ressenti. Vous pourriez être « colère » évidemment, car ceci ne correspond pas à vos dogmes que vous répétez sans réfléchir. Et penser que l’apprentissage par coeur est du côté des femmes et qu’il s’agit d’un mode d’apprentissage « pas très futé », est une arnaques de diseuse de bonne aventure. Permettez-moi de vous signaler que la mémoire est un processus qui relève de l’intelligence, car il s’agit d’organiser le réel et qu’elle est plus de l’apanage des hommes. Vous n’aurez qu’à relire Piaget pour vous en convaincre.

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